L’Europe du goupillon

par L’équipe de Fakir 24/10/2017

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Hymne et drapeau : tous les symboles de l’Union Européenne portent le sceau de l’Eglise.

La campagne référendaire sur le traité Constitutionnel Européen a été l’occasion de débats serrés sur « l’héritage judéo-chrétien » de l’Europe : fallait-il l’écrire dans le préambule de la Constitution – comme le réclamaient Angela Merkel et les Polonais ? Ou juste le penser très fort ? C’est que ça chatouille le laïcard, les références religieuses !

Or, question de références religieuses, l’Union n’a pas eu peur des symboles. Ainsi, chaque manifestation de l’U.E. tourne moins à la célébration du triomphe de la Raison et du matérialisme dialectique qu’au pardon breton (moins les binious) : oriflammes de la vierge et cantiques à tue-tête. Si si !

**Le drapeau des bigots…

Le Conseil de l’Europe, regroupement plus large que l’Union européenne, s’est doté en 1955 d’un drapeau à douze étoiles sur fond bleu. Pourquoi douze étoiles, pour un conseil qui ne comptait que six membres à l’origine ? Qui en a ensuite comporté neuf, puis quinze, et enfin 32 membres. Et, si on sait bien pourquoi ce drapeau n’est pas rouge, pourquoi est-il bleu ?

Son inventeur, le peintre Arsène Heitz l’explique clairement : « J’ai eu subitement l’idée de mettre les douze étoiles de la Médaille miraculeuse de la rue du Bac, sur fond bleu, couleur de la Sainte Vierge. Et mon projet fut adopté à l’unanimité, le 8 décembre 1955, fête de l’Immaculée Conception* ». Il s’est inspiré d’un chant qui ouvre la messe du 15 août, fête de l’Assomption de Marie. Cet « introït » reprend l’Apocalypse, chapitre XII : « Un signe grandiose est apparu dans le ciel, une femme revêtue du soleil, la lune sous ses pieds et sur sa tête une couronne de douze étoiles. »

**…les grenouilles de bénitiers…

C’est que les « pères fondateurs de l’Europe » - à l’exception du socialiste belge Paul-Henri Spaak – trempaient tous leurs doigts dans le bénitier. Ainsi, de Robert Schuman, pour qui « une demande de béatification a été déposée compte tenu de son œuvre et de sa foi. »

Dès le Congrès de La Haye, d’ailleurs, le pape Pie XII proférait là de longs discours, et à répétition, en « faveur de l’Union européenne » : « il n’y a pas de temps à perdre1, admonestait-il, il est grand temps qu’elle se fasse ». Le même qui, durant les cinq années de guerre, et les quinze années du nazisme, ne ressentait aucune urgence, n’avait guère prononcé un mot pour sauver les juifs d’Europe (sans parler des homosexuels et des communistes), là, d’un coup, pour bâtir cette Union, le temps pressait : « Certains se demandent même s’il n’est pas déjà trop tard. »

Et quelle devait être « l’âme de cette unité » ? « La religion ». Ça lui semblait bien parti : « Nous avons eu grand plaisir à lire en tête la résolution de la Commission culturelle à la suite du Congrès de La Haye en mai denier, la mention du ‘commun héritage de civilisation chrétienne’. »2

**…et leurs coassements !

Un demi-siècle plus tard, les églises se sont vidées, les pays européens sont largement laïcisés, mais l’Union européenne ne baisse pas les bras. C’est le fort chrétien Jacques Delors qui, en 1985, a repris le flambeau de la foi.

Si le drapeau ne suffisait pas, l’hymne officiel de l’Union passe la deuxième lame papale avant que le poil matérialiste ne se rétracte. L’Ode à la Joie, dernier mouvement de la neuvième symphonie de Beethoven a aussi des paroles (un poème de Friedrich Von Schiller). Tout le monde de bout, la main sur le cœur, et l’on reprend en chœur :

« Frères, au plus haut des cieux
Doit habiter un père aimé.
Tous les êtres se prosternent ?
Pressens-tu le créateur, Monde ?
Cherche-le au-dessus des cieux d’étoiles !
Au-dessus des étoiles, il doit habiter.
Joie ! Belle étincelle des dieux
Fille de l’Elysée,
Soyez unis êtres par millions !
Qu’un seul baiser enlace l’univers ! »

Et soudain, une question nous assaille : pourquoi ne pas avoir choisi l’hostie comme monnaie unique ?

* Entretien avec Heitz devant le carmel de Lisieux in Les 4 vérités Hebdo.
1 Discours au Sacré Collège, 2 juin 1948.
2 Allocation aux congressistes de l’Union européenne des fédéralistes, Castelgandolfo, 11 novembre 1948.

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