L’Uber dans les épinards ?

par Cyril Pocréaux 09/12/2021 paru dans le Fakir n°(96) Date de parution :

On a besoin de vous

Le journal fakir est un journal papier, en vente dans tous les bons kiosques près de chez vous. Il ne peut réaliser des reportages que parce qu’il est acheté ou parce qu’on y est abonné !

Un scandale se joue dans l’ombre, ces jours-ci, à l’Union européenne. Le Parlement, la Commission et le Conseil étaient parvenus à un accord historique pour permettre aux livreurs et chauffeurs des plateformes (Uber, Deliveroo and Co) d’être salariés par ces firmes, et non plus de simples exploités jetables. Mais ce vendredi 22 décembre, à Bruxelles, Macron, en sous-main, a saboté cet immense progrès social pour des millions de travailleurs en votant contre. Souvenez-vous, on vous racontait déjà ça dans le Fakir 96 : les livreurs face à Macron, le lobbyiste d’Uber. Les Uber files et les évènements actuels le confirment, malheureusement...

Une demi-douzaine de vélos devant le Mac Do, place de la Victoire à Bordeaux. Que des Blacks, avec des grands sacs sur le dos, Uber, Deliveroo. Accrochés aux guidons, leurs téléphones portables qui biiipbiiipent. « 2,90 € » je vois s’afficher, au bas d’un écran. « 1,3 km », avec le trajet indiqué.
« Donc là, vous attendez votre commande ?
— Si si, c’est ça. »

Le président de la République himself nous conseillait ça, durant les confinement, prônait « les commandes à distance, la vente à emporter ou la livraison à domicile. » Le même qui offrait une chouette alternative à la jeunesse : « Je ne vais pas interdire Uber et les VTC, ce serait renvoyer les jeunes vendre de la drogue à Stains ! », « Uber ou dealer ». à moi, cet univers m’est étranger : jamais je n’ai commandé mon repas en ligne. Alors, j’essaie d’engager la conversation, mais les échanges sont sommaires, le français rudimentaire :
« Et ça paie bien ?
— Oui oui, bon métier… Mais problème, c’est prix. »

Masque relevé jusqu’au casque, Jérémy est nettement plus bavard : « Y a vachement de sans-papiers, maintenant. Avec chacun leur coin, ici les Africains, plus loin les Afghans… » Biiipbiiip. « Ah non, ça c’est une course de merde, pour les tacos ils sont affreusement lents… » Biiipbiiip. « Ah, Nobi Nobi, c’est pas trop loin et ils sont assez cools…
— C’est payé combien ?
— 3,88 €. Avant, le tarif minimum, c’était 4,60 € la course. L’an dernier, c’est passé à 2,60 € d’un coup, comme ça, sans discuter.
— Tu as perdu beaucoup ?
— Non, j’ai pédalé plus ! J’ai calculé, pour combler la perte, je fais 600 kilomètres de plus par mois. »

Jérémy pousse son vélo dans la rue piétonne, on l’accompagne.
« Comment t’as commencé ?
— Je m’étais fait spammer par une belle pub sur Internet qui promettait 15 euros de l’heure, soyez votre propre patron...
— C’était du brut ou du net ?
— C’était pas indiqué. C’est seulement après que j’ai découvert la subtilité du net et du brut. Moi, j’avais fait du salariat, dans la restauration, je voulais tester un truc nouveau… »
Arrivé devant chez Nobi Nobi, y a un écran divisé en deux : « En préparation / à emporter », avec des numéros de chaque côté. « Tu vois, la commande pour Razzane, elle est en quatrième… Faut patienter un peu, et l’attente, c’est pas payé.
— Tu gagnes combien, finalement ?
— En moyenne, avec 50 heures par semaine, je fais 1500 bruts. On enlève les 22 % des plateformes, ça fait déjà 1200 euros. Plus la mutuelle et la prévoyance, on est à 1000 euros net. »
Reste à payer, là-dessus, quelque 24 % de cotisations, en tant qu’autoentrepreneur. « J’ai éclaté mon téléphone la semaine dernière : 300 euros en moins de ma poche. Du coup, les trois quarts des livreurs ne prennent pas de prévoyance. Moi, j’ai testé, mais j’ai chopé une pneumopathie en 2018, pendant un mois et demi je l’ai senti passer… Ah, ça y est, ils ont fait vite. »
« Razzane » est passé dans la colonne « à emporter », et Jérémy ouvre grand son sac pour embarquer le colis. On rebrousse chemin.
« Là, le client, sur son portable, il peut voir où en est sa commande, où je me trouve… Comme on marche, il va trouver ça trop lent, trop bizarre… Une fois, il m’est arrivé un accident, et le client au téléphone a osé me dire : “Moi je m’en fous ! Je veux ma commande !” J’étais tombé, j’avais failli me manger un tram, et il voulait que je le livre ! Je comprends qu’il y en a qui aient faim, m’enfin… »
Place de la Victoire, où on repasse, un camion des Resto du Cœur s’est installé.
« Regarde, me fait remarquer Jérémie, dans la queue pour se faire servir, y a un, deux, trois livreurs Uber… »
On croise Clément, aussi, un copain de Jérémy : « Les six derniers mois, j’ai vécu un calvaire, un calvaire psychologique. Faut comprendre que la plateforme peut nous déconnecter à n’importe quel moment. Sans nous dire un mot, rien…
— C’est la mort professionnelle, la déconnexion ?
— Ben oui. On n’a pas de contrat, on n’a rien. Donc il suffit que tu sois en dessous, niveau statistiques, ou tu prends un weekend, tu baisses. On est emprisonnés. Moi, je vivais dans la peur… »

« Il y a un chiffre qui me ravit, s’extasiait Geoffroy Roux de Bézieux, ce sont les créations d’entreprises. Parce que pour créer son entreprise en ce moment, il faut… Je ne vais pas utiliser une expression triviale, mais ‘‘faut en avoir quoi’’. » Ou il faut n’avoir pas le choix. Et ces entrepreneurs, les voilà : à vélo ou en voiture…
« Eh, m’dame, je suis en train de faire une interview avec un journaliste, ça vous dérange pas que je réponde en vous conduisant ? C’est que je suis quelqu’un de célèbre, hein ! »
Il est tout sourire, Houcine, le temps de sa course, dans son VTC parisien.
Mais dès que la cliente est sortie, le visage se ferme, à nouveau.
« Je suis arrivé au bout. Tu vois quelqu’un de dépressif, qui se fout de tout ? C’est moi, même si j’essaie d’avoir de l’humour.  » Six ans, déjà, qu’il bosse pour Uber. Il avait 26 ans.
« Au début, c’était le rêve américain. Uber venait de s’installer, ils avaient besoin de nous. Ils s’en foutaient de perdre de l’argent. Ils nous ont promis la Lune, et nous on a été naïfs. Ils sont allés chercher une clientèle qui n’existait pas, qui n’utilisait pas les taxis, pour casser les prix.
— Ils ont réussi ?
— Ben là, tu vois, j’ai fait une course à 6 euros, pour 45 minutes de trajet, de Montparnasse à la Tour Eiffel… Là, dessus, Uber prend 25 %, je paye 24 % de charges, il me reste 3 euros pour payer l’essence, les pneus, l’assurance, les amendes… Et après, je me paye. Rien, donc. C’est un truc de fou… »

Ils sont des milliers, des centaines de milliers, comme lui, en voiture, à conduire des passagers, en vélo ou en scooter, à livrer des repas, des objets, de tout, tout ce qu’il est possible de commander. Et parmi eux, des jeunes, surtout : un tiers des créateurs d’entreprises individuelles, sésame pour les plateformes, les fameux autoentrepreneurs, sans protection ni contrats, sont des jeunes.

« Quand j’ai commencé en 2014, on s’y retrouvait, au niveau du prix des courses, calcule Taoufik, lui aussi chauffeur pour des plateformes. Mais à partir de 2016, ils ont baissé les prix, au maximum, sans concertation, au détriment des chauffeurs, qui ne gagnent plus rien du tout. C’est un massacre, ce que nous font ces applications… On a juste les inconvénients d’un patron, sans les avantages. Tu peux refuser des courses, mais ils te mettent la pression sur ton taux d’annulation, jusqu’à te suspendre ou supprimer ton compte si tu bosses pas assez. Ils te virent comme ils veulent, vu qu’ils ne sont pas ton employeur… »
Alors, Taoufik et les autres bossent, bossent, courent après les euros. Au détriment de tout le reste. « Si tu veux faire du chiffre, faut être là aux heures de pointe, le matin et le soir, faire 250, 300 euros par jour pour que ça commence à être rentable, alors tu bosses 10, 12, 13 heures dans ta voiture. Ça peut pas être un projet de vie, on peut pas faire ce métier très longtemps. Non, passer douze heures par jour dans la circulation, c’est pas possible. C’est un stress mental énorme, et c’est risqué.
— Mais comment tu fais pour le reste ? T’as des enfants ?
— Oui. Je dépose mon fils à l’école à 8h15, et j’enchaîne jusqu’au soir, à 18h. Là, je repasse le prendre à l’école, je le dépose à la maison et je repars, jusqu’à 21h00, parce que j’ai pas fait assez de chiffre. Et le weekend, je bosse de 14h à 5h du matin, c’est là que les gens sortent. Ça m’a coûté mon divorce, en 2018. J’étais marié depuis 2013. Je voyais plus ma femme ni mes enfants. Parce que si tu veux élever des enfants et avoir une vie de famille digne, c’est pas possible. Tout ça, c’est un cercle vicieux. On nous vend du rêve. Ce métier, il est voué à l’échec. »

Le schéma est le même, partout : au début des années 2010, les plateformes proposent des tarifs pour flotter un peu au-dessus du Smic, gérer ses horaires, se sentir libres. Le pied pour les étudiants, les chômeurs, ou même les intérimaires. Bien sûr, derrière, pas de contrat de travail, pas de congés, pas de chômage.

Retour à Bordeaux. Arthur Hay s’est lancé dans la livraison à vélo, terrain de chasse des Deliveroo et autres Uber Eats, juste avant que les choses ne se gâtent, en 2016. « On est descendus à 7,5 euros de l’heure, en brut, pour un autoentrepreneur. Il te restait pas grand-chose derrière. à ce niveau-là, il faut travailler les weekends et le soir, pour avoir les 50 euros de primes. Mais ça te gâche quand même ta vie sociale, quand tu es jeune… »

Qu’importe : de plus en plus tapent à la porte. Les livreurs se bousculent, la concurrence devient féroce entre les plateformes. « Ça a basculé à l’été 2016, avec la faillite de Take eat easy. Tu t’es retrouvé avec un nombre incroyable de livreurs sur le marché, et Deliveroo a recruté tout le monde. Facile puisqu’il n’y avait pas à payer les gens, et qu’on pouvait les virer en changeant leur mot de passe. » Comme pour les VTC, le prix de la livraison s’effondre. « En quatre ans, avec l’augmentation du nombre de livreurs, le prix de la course est passé de 7 à 2,5 euros », calcule Jérôme Pimot, un des livreurs pionniers du secteur, qui a fondé le Clap, pour Collectif des Livreurs Autonomes de Paris. « Uber Eats est arrivé et a fait exploser le marché. Sur ces plateformes, il y avait déjà beaucoup d’étudiants, d’intermittents du spectacle, de chômeurs. Mais en 2017, Uber Eats est arrivé et a recruté les petits frères des chauffeurs VTC qui n’avaient pas l’argent pour se payer une voiture. On a vu arriver beaucoup de livreurs venus des quartiers, fatalistes sur le fait qu’ils ne trouveraient rien d’autre.  » C’est la banlieue, contrainte et forcée, qui nourrit la capitale, le 93 qui passe les plats pour Paris. La périphérie qui sert les centres villes, plus favorisés.

C’est, surtout, un modèle rêvé du macronisme : éclater le salariat. Après les CDD, après les stages, après l’intérim, l’autoentrepreneur comme une nouvelle étape dans la précarité. Pour Arthur, c’est clair : « Ils sont prêts à te payer zéro euro de l’heure. Tu vas devant le resto et tu attends que la commande soit prête, t’es pas payé. Quand le client descend, t’es pas payé. Quand t’a pas de commande, t’es pas payé. »
C’est une question clé, il nous semble : comment comptabilise-t-on le temps de travail ? à la tâche effectuée, donc au rabais, a minima, ou au temps passé pour la mener à bien ? Le même combat qui se joue pour les auxiliaires de vie sociale, entre autres, pas payées quand elles courent d’une personne âgée à la suivante, saucissonnant leurs journées et leurs salaires. Uber, Deliveroo, et les autres plateformes incarnent ce modèle : ne payer que le temps de travail hyper efficient. Travailler plus pour gagner moins.
Avec cette bataille, donc, en cours : estce que Uber et les autres vont être ramenés dans la norme du salariat ? Ou, au contraire, estce que ce modèle va contaminer tous les métiers ?

Alors, Arthur et ses potes ont voulu se faire entendre. « Un jour, en novembre 2016, on a décidé de faire une action : respecter le code de la route, ne pas dépasser les limites de vitesse. Parce que quand tu as une livraison, tu fuses. Jamais tu ne t’arrêtes à un feu rouge et si tu le fais, le livreur qui passe à côté de toi il se marre. En période de rush, y a pas de piétons, pas de code de la route, et c’est de pire en pire. Plein de fois, je me suis dit que je faisais n’importe quoi. Eh ben les cinq personnes qui s’y sont le mieux tenues, au code, ont été déconnectées, dans la foulée. J’avais été plongeur, serveur, j’avais bossé dans un centre d’appels, c’était plus encadré, tu avais des congés, une date d’entrée… Là, tout se fait à l’oral, et dans un ou deux mails. à la base, je m’en foutais : je me disais que j’allais y rester deux ou trois semaines et me barrer. Mais quand tu es étudiant, c’est difficile de trouver autre chose… »

Quitte à ramer. Arthur, encore  : « La plateforme, ça te déconnecte de tout, et au final ça te casse le mental. Et puis, ça t’attaque le cerveau, tu es traité comme de la merde. Ici, tu retrouves ceux qui ont frappé à toutes les portes, avant : les chômeurs, les sans papiers… C’est le fond de la république, les oubliés de la démocratie. »
Certains craquent. Sacha, étudiant en région parisienne, qui parce qu’il n’a pas le temps d’y assister écoute ses cours en conduisant pendant ses commandes, a fini par avoir des hallucinations. Manuel, à Montpellier, a lui « arrêté depuis trois mois de [se] prostituer pour le compte des plateformes. J’ai connu des jours bien, mais là c’est une descente aux enfers. Nous survivons chaque jour. Le fond de la mine c’est nous. Ce sont toujours les mêmes qui creusent au fond. Les mal orientés, les benêts, le fond de la classe sociale. C’est épuisant de crier dans le vide. »
Christelle vit à Montpellier, elle aussi. Elle ne livre pas, mais elle a vu l’état mental de son fils se dégrader. « Les livreurs sont tellement nombreux ! On dirait une meute qui se bat pour un os ! C’est la concurrence dans toute sa splendeur. Mon fils, il a vingt ans et aujourd’hui il a la rage contre ce système. C’est pas simple, hein, d’avoir cet âge sans diplôme et la perspective de vivre au jour le jour, avec des miettes. » « On est sur une bombe humaine à retardement », prévient Sayah Baaroun, syndicaliste Unsa dans le milieu du VTC. « La politique de Macron c’est : occupe-les à croire qu’ils sont patrons du CAC40, et ils te foutront la paix. »

Mais ça marche. Mieux, même : de nouveaux bataillons, toujours, se pressent aux portes. Jules, livreur à vélo dans le Val-de-Marne, nous raconte ça. « Je rentre chez moi, referme la porte de mon immeuble, quelqu’un cogne dessus depuis la rue, je ressors, un type m’interpelle, grand, mince, le visage creusé, un léger accent. ‘‘Tu fais Deliveroo ? Si tu travailles pas moi je travaille.’’ Je comprends pas, qu’est-ce qu’il raconte ? Il voulait que je lui loue mon compte, il n’a pas de papiers. Si j’accepte, je lui prête mon profil numérique, je reçois sa paie sur mon compte, prends une commission, lui reverse le reste. Il bosse à ma place, quoi. Certains font payer ce service 100 euros par semaine, d’autres prennent un pourcentage des gains, 20, 30, 50 %. J’ai refusé. devenir un exploité qui exploite un autre exploité, je ne le sens pas, même pour rendre service. »
Depuis un an, la tendance monte en flèche. Les bataillons de sans papiers à compte sous-loué font florès, dans les grandes métropoles. Et si Uber Eats affiche une moyenne d’âge officielle de 26 ans pour ses « collaborateurs », de plus en plus de jeunes, y compris mineurs, 15, 16 ans, montent à scooter pour livrer. Charlotte, 34 ans, prof de lettres-histoire dans un lycée pro de Seine-Saint-Denis, en témoignait dans Libé, l’année dernière : «  ‘‘Uber, c’est une plaie pour nous, ça attire nos élèves. Et certains tombent dans le piège.’’ Elle insiste sur le mot ‘‘piège’’ car ‘‘ç’en est un. C’est une manne qui semble facile, sauf que ça empiète sur leur scolarité, cela vient même en concurrence avec le lycée’’. »

« La disruption, pour Macron, c’est de ne pas respecter le droit du travail », s’agace Arthur. Face à ça, avec ses collègues, il a monté, en Gironde, le collectif des Coursiers indépendants bordelais. à Paris, le Clap était déjà en place. à Nantes, Naofood, Kooglof en Alsace, L’Asso des coursiers rennais en Bretagne : les coopératives poussent comme des champignons, en opposition au monde ubérisé qu’on veut leur vendre. Et se rapprochent, parfois, des syndicats, malgré les obstacles, les différences culturelles. « On n’a pas les centaines de millions des grandes plateformes, mais on montre, au moins, qu’une alternative existe  », estime Arthur. « Quand ils ne sont pas sur l’appli avec leur téléphone, en attendant une course, les livreurs passent sur les réseaux sociaux, observe Jérôme. Et là, ça cause, de plus en plus. Des réseaux se montent pour contester. En fait, l’ubérisation, c’est un mix de trois trucs : la sous-traitance, l’intérim et les franchises. Une destruction de tout collectif de travail. Mais je parlerais volontiers de renouveau de la conscience de classe, oui : beaucoup de collectifs se montent, y compris au niveau européen. »

Il faudra bien ça : pour la Macronie ce nouveau lumpenprolétariat est essentiel. C’est leur monde rêvé, leur idéal, leur « projeeeeeeet ». « A Bruxelles, embraye Arthur, ils sont au taquet, les macronistes, pour faire en sorte que le système soit maintenu, que ça vienne de l’Europe, et dire ensuite ‘‘on est obligés de s’y tenir.’’ »
Houcine, dans son VTC parisien, m’en avait parlé, déjà.
« Pendant la campagne de 2017, Macron avait dit ‘‘je vais faire en sorte qu’Uber ne descende pas en-dessous d’un certain seuil de rémunération pour les chauffeurs’’. Mais rien n’est venu. Pourtant, le patron d’Uber, il a été invité quatre fois à manger à l’Elysée, depuis. Quand j’ai vu ça, je me suis dit ‘‘Ouh là, attention à lui, Macron il va le boxer !’’. Mais non, rien ! Rien ! Qu’est-ce qui s’est passé ? Il nous a sorti la loi LOM, qui dit que si la plateforme fait une charte sociale, le contrat ne peut pas être requalifié en contrat de travail. Une charte ! Ils demandent à Uber de faire une charte ! C’est à se taper la tête contre les murs ! En fait, aujourd’hui, le gouvernement, il vient nous voir et il nous dit qu’il va faire une loi pour négocier avec le banditisme. Je suis un bandit, je fais des trucs illégaux, et si je me fais attraper, ben OK, je garde juste la moitié du butin. Une charte ! Heureusement, le Conseil constitutionnel a rejeté cet article. Parce que, en fait, il nous dit quoi, Macron ? ‘‘C’est la mondialisation, tu peux pas comprendre, et c’est comme ça.’’ Voilà ce qu’il nous dit, Macron. Et attention, ils ont commencé avec nous, les chauffeurs, mais ils vont aller partout. J’ai vu un étudiant qui bossait avec une plateforme qui bossait avec une boîte d’intérim. Une heure à Monoprix, deux heures là… Ils se créent une armée de réserve. C’est leur monde. Un monde de fous. »

Cyril Pocréaux

La suite du dossier (interview de Leïla Chaibi) :
http://fakirpresse.info/leila-chaibi-macron-le-lobbyiste-d-uber

Écrire un commentaire

Attention, votre message n’apparaîtra qu’après avoir été relu et approuvé.

modération a priori

Ce forum est modéré a priori : votre contribution n’apparaîtra qu’après avoir été validée par un administrateur du site.

Qui êtes-vous ?
  • Pour créer des paragraphes, laissez simplement des lignes vides.