Front national, virage social ? (1/3)

par François Ruffin 07/12/2015 paru dans le Fakir n°(63 ) décembre - janvier 2014

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« L’Etat est devenu l’instrument du renoncement, devant l’argent, face à la volonté toujours plus insistante des marchés financiers, des milliardaires qui détricotent notre industrie et jettent des millions d’hommes et de femmes de notre pays dans le chômage, la précarité et la misère.
Oui, il faut en finir avec le règne de l’argent-roi. »

C’est troublant, non ?, quand Marine Le Pen s’attaque « aux dogmes de l’ultra-libéralisme ». Depuis quand, on s’est demandés, un peu emmerdés, depuis quand le Front national cause comme ça, un peu comme nous ? « Etat », « Impôts », « Service public », « Entreprise », « Europe », « mondialisation », etc. Qu’a-t-on en commun ? Qu’est-ce qui nous sépare ?

On a décidé de mener des recherches, une espèce d’archéologie, sur la « pensée économique et sociale » par un retour aux sources : les professions de foi et les tracts du FN depuis sa fondation, dans les années 70.

C’est un passage sur France Inter, ce printemps, qui m’a fasciné et glacé :

Florian Philippot, n°2 du FN : Cet après-midi, François Hollande… j’espère qu’il s’exprimera en français d’ailleurs, et pas en allemand, puisque qu’il est allé chercher ses instructions chez madame Merkel, comme d’habitude, mais j’espère qu’il aura eu le temps de traduire...
Patrick Cohen, journaliste : Quelles instructions ?
Florian Philippot : Ses instructions sur la politique qu’il doit mener, sur la politique d’austérité, sur la politique de saccage social qu’il va annoncer aux Français cet après-midi, de la même manière que Nicolas Sarkozy l’aurait annoncé dans les même termes, au même moment, de la même manière, s’il avait était réélu. Cet après-midi, nous aurons dans toute sa splendeur, sa triste splendeur j’ai envie de dire, un chef de gouvernement technique. Qui viendra dérouler la feuille de route de Bruxelles : la flexibilisation du marché du travail, une nouvelle précarisation des retraites, la privatisation, le refus de toute forme de patriotisme économique au soutien de nos petites entreprises. Et évidement cette politique-là c’est celle qui a lui a valu les bons points des commissaires européens. (16 mai 2013.)

Et il enchaînait comme ça, cinq minutes durant, où on l’aurait pris pour Mélenchon en gros, où j’aurais signé des quatre mains si j’en avais quatre – avant qu’il ne revienne à des antiennes plus traditionnelles au FN : l’immigration, l’islam, etc.

[*Consultation*]

Ça me troublait.
Nous aussi, on cause de « flexibilisation », et de « précarisation », et de « privatisation ». Nous aussi, on critique vivement Bruxelles et Merkel. Nous aussi, on prône le protectionnisme. Nous aussi, on met en cause l’euro, etc.
Depuis quand, je me suis demandé, on a tout ça en commun avec le Front National ?
Je l’ai demandé par courriel à un intello de renom, aussi. Qui m’a vertement reproché mon « en commun » : « Nous ne partageons rien avec le FN : le FN nous a pillé, c’est tout autre chose ! »
Soucieux d’honnêteté, je l’interrogeais : «  Peut-on dire que le FN ‘pille’ le programme de la gauche avec le protectionnisme et j’ajouterais : la sortie de l’euro ? Ca ne m’apparaît pas évident. Depuis les années 80, à la fois la gauche radicale et la gauche gouvernementale ont déserté ces questions. »
Certes, concéda-t-il, « tu n’as sans doute pas tort "techniquement" sur la question du protectionnisme, on pourrait ajouter aussi sur la finance si on veut - la critique d’extrême droite de la finance ça existe depuis les années 30... Mais tout de même quel tête-à-queue idéologique avec le FN des années 80-90. C’est cela qui soutient l’accusation qu’ils nous pillent. »
Je crois à ça, moi : « grande est la vérité et elle l’emporte sur toutes choses » (oui, c’est dans la Bible). Même lorsqu’elle nous dérange, on doit l’affronter. Or, cette vérité – me semblait-il – sur les changements, les variations, mais aussi les constantes dans le discours du FN, ni lui ni moi ne la maitrisions : « Connaîtrais-tu des collègues universitaires qui auraient travaillé sur le renouvellement de doctrine économique du FN ? »
Et lui d’admettre : « Ça c’est une colle... Je fais a priori le pari que ça doit exister - mais où ? Je vais chercher un peu et si je trouve quelque chose je te dis. »

[*Bien-pensance*]

J’ai cherché un peu, aussi.
Je me suis tapé une palanquée de bouquins sur Le Pen père et fille, à la bibliothèque municipale d’Amiens. Mais ces livres se centraient sur les valeurs morales – racisme, antisémitisme, laïcité – et effleuraient à peine la question économique. Ils adoptaient, par ailleurs, un point de vue très orthodoxe, conformiste, bien-pensant, qui ne saurait être le nôtre.
Ainsi de la biographie Marine Le Pen rédigée par Caroline Fourest et Fiammetta Venner. Quant à la sortie de l’euro, les auteures dénoncent, en vrac, « des scénarios improbables, fortement hypothétiques », de la « science-fiction », une « posture à la fois rhétorique et nostalgique », un choix qui « signifierait une explosion du coût de la vie », etc. Le débat est tranché avant d’être posé, en deux pages.
Avec le protectionnisme, c’est presque pire : d’emblée, voilà cette proposition déclarée « hors sol », faisant de la France « un cimetière pour main d’œuvre bon marché, qui aura perdu toute puissance ». Et lorsque Marine Le Pen s’en prend au libre-échange « débridé », les essayistes se lancent dans une glose pseudo-savante : « Le sous-entendu ne manque pas de saveur. Car le mot ‘débridé’ fait inconsciemment penser à quelque décadence imputable à mai 68 ou à la liberté des mœurs. En l’utilisant pour parler du libre-échange, Marine Le Pen amalgame de façon subliminale le libéralisme économique et le libéralisme social. » Plutôt que de s’attaquer au sujet lui-même, concret, matériel, faut-il des barrières douanières ou non ? Pour quoi faire ? Pour servir quels intérêts ?, les essayistes le fuient et recourent à l’ « inconscient ».
Enfin, quand Marine Le Pen se prononce « pour le retour à l’échelle mobile des salaires afin de gonfler le pouvoir d’achat », les biographes – aveuglées par leurs a priori – démontrent leur nullité : « Une mesure, nous disent-elles, qui conduirait à refuser la moindre sécurité de revenu et à déréguler les acquis sociaux. Pas vraiment de gauche. » Alors que c’est tout le contraire : que les salaires augmentent automatiquement avec l’inflation, et pas juste le SMIC, c’est une revendication historique de la CGT, par exemple, « vraiment de gauche ». Zéro pointé en éco. Et dire que Fourest professe à Science-Po, dans Le Monde, à France Culture et à France Inter…

[*Limites*]

Comme ce boulot, sur la pensée économique du FN, sur son archéologie, ne semblait pas mené, on a décidé de s’y coller. D’en revenir aux textes, aux sources. Sans hystérie ni complaisance, avec un souci de vérité, qui nous a menés pour plusieurs journées à la Bibliothèque nationale de France, aux Archives parlementaires, au Service des élections de la préfecture d’Arras, à la Documentation du Pas-de-Calais, à la bibliothèque de Lille, ou encore sur le site Inamédiapro.

Malgré ce sérieux, malgré les efforts déployés, il faut indiquer les limites de notre recherche :
D’abord, nous l’avons menée en journalistes, c’est-à-dire avec une durée d’enquête réduite, et qui plus est en journalistes guère spécialistes de l’extrême-droite (on revendiquerait, plutôt, une compétence en dissidence économique). Des thésards feront beaucoup mieux – ou sans doute ont fait, et nous ignorons leurs travaux.
Ensuite, dans les documents recueillis, on privilégie les tracts du Front National, les professions de foi des candidats, bien sûr emplis de promesses et d’une présentation avenante de soi. En politique plus qu’ailleurs, le discours est fait autant pour cacher que pour révéler : on ne confondra donc pas, à l’évidence, ces engagements avec des actes à venir, ou même avec la réalité présente du parti.
Enfin, le discours du Front national, et même son discours social, n’explique qu’à la marge ses succès électoraux d’hier et de demain. C’est dans les abandons successifs de la gauche gouvernementale, dans ses navrantes expériences au pouvoir, dans ses renoncements à lutter contre le libre-échange, contre la finance, contre une monnaie forte, contre les dogmes bruxellois, et au final contre ce mal endémique, le chômage, c’est ici que demeure, pour nous, la cause majeure de la réussite des Le Pen : un boulevard ouvert dans les classes populaires. Qu’on y ajoute les responsabilités de l’autre gauche, la « vraie », la puérilité de ses divisions, la timidité de ses positions, elle qui échoue jusqu’ici à incarner une voix de secours.

Ces préalables établis, allons-y : plongeons avec délices dans quatre décennies de littérature frontiste…

[**ETAT*]

[(Après.
« Parce que c’est la condition première de la justice, nous rebâtirons l’État et nous lui redonnerons l’autorité, la neutralité, une conscience nationale et les moyens de fonctionnement et de modernisation dont il a besoin. »
Marine Le Pen, discours de Tours, 16 janvier 2011.
)]

[**Avant. 1974. Contre « l’étatisme économique »*]

« Presse, radio, éditions, sont colonisés par les propagandistes de la subversion marxiste, de la pornographie agressive. L’Université et l’Eglise prêchent la révolution. Les grands intérêts capitalistes et les syndicats marxistes défient victorieusement la puissance publique. La sécurité des personnes et des biens n’est plus assurée. Le crime est à l’ordre du jour et l’escroquerie impunie demeure monnaie courante. »
Pour sa première participation à une élection présidentielle, en 1974, le Front National a déjà trouvé sa rhétorique : tout fout le camp. Mais un espoir demeure : « contre cette décadence dont l’opinion longtemps chloroformée commence à prendre conscience, un seul recours : la création d’une mystique de Salut public », que porte l’inspiré Jean-Marie Le Pen.

[*Mamelles*]

Au passage, en quatre pages, pas un mot n’est lâché sur l’immigration – en ces années où, pourtant, les flux de main d’œuvre étrangère et les regroupements familiaux culminent. Non, un seul ennemi : l’Etat. Comme premier point de ses « Orientations politiques et sociales essentielles », Jean-Marie Le Pen ambitionne donc :
« 1. Ramener l’Etat à ses fonctions normales : technocratie et bureaucratie sont les deux mamelles de la Vème république : elles épuisent le pays où sont dès maintenant créées les conditions du socialisme. L’Etat doit réduire son train de vie, dénationaliser ce qui peut l’être, diminuer les effectifs pléthoriques du service public. »

[*Code génétique*]

Voilà le code génétique, à sa naissance, du Front national, sa raison d’être.
Et qui le marque durablement.
En 1981, aux législatives : « Le socialisme c’est au départ l’Etat providence, puis l’Etat patron pour finir par l’Etat kapo. C’est la multiplication des bureaucrates, des fonctionnaires, des contrôles, des formalités, de la fiscalité, c’est la ruine des entreprises écrasées sous le poids des charges et des impôts et menacées par la dictature des banques étatisées et des syndicats révolutionnaires. »
En 1984, aux élections européennes : « Secteur après secteur, le Gouvernement socialo-communiste réalise la révolution marxiste qui conduit à la perte de nos libertés avec pour fin inéluctable les horreurs du goulag. Battre les communistes, c’est faire échec à la révolution marxiste qu’ils préparent avec l’appui des organisations immigrées.
« Pour reconstruire la France, il faut réduire :
– le domaine de l’Etat ;
– le nombre des fonctionnaires ;
– les dépenses publiques.
« Pour cela, il faut également :
– inverser le courant de l’immigration. »

L’immigration apparaît alors, mais comme objet secondaire, soutien à la « révolution marxiste ».

[*Reaganiens*]

« Il faut désengager l’Etat partout où on pourra le faire. Oui, moins de fonction publique ! Moins d’entreprises nationalisées ! Là où il y aura moins d’Etat, les Français seront toujours gagnants ! Je vous en supplie : supprimons toutes les réglementations et laissons jouer la libre concurrence. Nous en avons assez des contrôles ! Voilà que nous avons un espoir d’avoir un bol d’air libéral de libre concurrence »
(François Bachelot, député FN).
En ces années 80, les USA plongent avec Ronald Reagan dans le libéralisme.
Margaret Thatcher œuvre de même au Royaume-Uni.
Jacques Chirac, devenu Premier ministre, se veut leur épigone en France. Mais à l’Assemblée nationale, il doit affronter plus reaganien, plus pro-américain : les trente-cinq députés du Front national, qui s’affichent partisans de la « révolution libérale ».

[*
Le soleil*]

« Du côté de l’Ouest se lève le soleil de la liberté et de la prospérité », plaide Jean-Marie Le Pen. Aussi réclame-t-il qu’on imite l’exemple américain, en tout : par une « révolution fiscale qui est en train de secouer l’Amérique », par une « remise en cause du rôle de l’Etat, de l’importance de la fonction publique, du coût des services publics », ainsi que « de notre système de protection sociale, dont le coût ne cesse de grimper vertigineusement », etc. (23 avril 1986, Journal officiel).
L’extrême-droite est aussi, alors, sans confusion, une extrême droite économique.

Dès la première session parlementaire, le 5 mai 1986, est ainsi présenté un projet de privatisations. 64 entreprises sont mentionnées : Havas, Rhône-Poulenc, Matra, Péchiney, Elf, etc., mais il s’agit notamment des banques, BNP, Paribas, Suez, Crédit lyonnais, Crédit du Nord, Société générale, 42 au total, tout le secteur bancaire public.
Comment intervient alors Bruno Mégret, applaudi par ses collègues sur les bancs du Front national ? Va-t-il s’opposer à cette grande braderie ? Pas franchement : « Nous approuvons pleinement les principes d’une privatisation de grande envergure comme celle que vous nous proposez. C’est la première amorce, depuis la guerre, d’un recul de l’Etat et du socialisme. Que l’Etat se consacre d’abord à ses missions premières et que l’économie redevienne l’apanage de la société civile ! Mais si l’Etat ne doit plus produire de télévisions, garer d’espaces publicitaires, on ne voit pas pourquoi il devrait, après 1991, continuer à fabriquer des automobiles et à produire des rails de chemin de fer. » Le gouvernement, à l’écouter, s’arrête à mi-chemin. Et de proposer un «  sous-amendement » qui « ajoute trois sociétés qui exercent leur activité dans le secteur industriel et concurrentiel. Il s’agit de Renault, de Sacilor et d’Usinor. »

[*Engluée*]

Ce sont des années clés pour la France, avec un gouvernement RPR libéral, qui se revendique libéral, et qui mène une politique ouvertement libérale : idéologiquement, presque psychologiquement, le pays bascule alors. Et sur tous les thèmes – amnistie fiscale, impôts sur les sociétés, dérégulations –, les députés Front National se montrent si ultras, si extrémistes, si vigilants à ce que disparaisse « l’Etat régulateur », qu’ils font passer Chirac, Balladur and co pour de quasi-centristes !
« Faire refluer l’Etat, redonner confiance aux acteurs économiques, responsabiliser les citoyens, voilà des ambitions auxquelles nous souscrivons pleinement. Elles sont nôtres. Nous avons toujours défendu la libéralisation de l’économie comme l’un des préalables au renouveau de notre pays. La France s’est engluée trop longtemps dans la perversion de l’étatisme. La perte de compétitivité, la faiblesse de notre industrie, les carences de sa pénétration sur les marchés extérieurs, toutes nos difficultés - dont la plus cruelle, nos trois millions de chômeurs - sont la preuve irréfutable de l’échec des recettes interventionnistes, socialistes ou sociales-démocrates. »
Et dire qu’aujourd’hui, la fille veut faire marche arrière sur ce chemin, s’adonner à la « perversion de l’étatisme »…

(la suite très bientôt...)

Un dossier de François Ruffin, avec Vincent et Fiona.
Tous nos remerciements, pour leur patience, aux documentalistes qui nous ont apporté leur aide – et notamment à Frédéric, de la Bibliothèque nationale de France.

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  • Bonjour et merci pour cet article absolument nécessaire. J’attends la suite avec grand intérêt.

  • Fakir aux premières loges : une femme de ménage bat un "baron" aux élections dans l’Aisne !!
    Le "baron", PS. La femme de ménage, FN...

    Article du Monde : Pendant près de trente ans, Marie-Jeanne Parfait a été employée à la municipalité de Marle, dans l’Aisne, notamment à l’entretien. Il lui fallait emprunter l’escalier d’honneur pour utiliser une salle de bains, son logement de fonction n’en comptant pas, et marcher sur la pointe des pieds les jours de réception. Le maire s’appelait Yves Daudigny, socialiste, devenu l’un des politiques les plus puissants et respectés du département, président du conseil général, de la communauté de communes, puis sénateur.
    Depuis ses débuts, en 1983, Daudigny n’a jamais perdu un seul scrutin, passant dès le 1er tour, et à chaque fois. Sa première défaite, particulièrement cuisante, vient d’avoir lieu aux élections départementales : dimanche 22 mars, il a échoué à la troisième place dans le canton de Marle. C’est Pierre-Jean Verzelen, jeune hussard de l’UMP, qui est arrivé en tête, une surprise, avec 37,62 % des voix. Entre les deux, un binôme s’est interposé, faisant définitivement trébucher Daudigny : celle qui le conduit, pour le Front national, est Marie-Jeanne Parfait, sa femme de ménage, ou plutôt celle de la mairie.

    Après le discours et les électeurs, voici les candidats qui font du FN le véritable parti... populaire.

    Pour une fois que la concurrence aurait du bon, y en a pas beaucoup...
    Et avec un Front de Gauche dont la politique a l’air d’être de s’allier avec les européo-bobos de EELV, je suis pas sûr que ça ne diminue pas encore.

  • Bonjour
    Merci pour avoir décortiqué le programme économique du FN qui n’existe pas sur le fond, ce parti surfe sur la vague des mécontents joue dans la cour des partis respectables notamment grâce au abstentions.

  • Très bon article, mais c’est qui votre "intello de renom" ?

    Franchement il aurait pu vous orienter un peu mieux que vers Fourest.
    Il y a quantité de bouquins d’histoire très intéressants sur le FN, on peut citer :
     Histoire du Front national de Albertini et Boucet (le plus récent).
     Le Front National à découvert de Nonna Mayer (collectif, l’article de Tagguief pourrait vous concerner).

    Il faut aussi tenir compte du fait que si le FN a toujours été chapeauté par les Le Pen, il a été composé très tôt de tendances, divergents totalement de la ligne officielle et composé, jusqu’au puputch de Megret, en grande partie de Nationaliste-Révolutionnaire, partisans d’un état fort et social.

    Les premières années, ces gens là forment l’essentiel de la base militante, même si ils sont tenus à l’écart de l’équipe dirigeante (à part Francois Duprat, cf les travaux de Nicolas Lebourg sur lui. On trouve facilement son "Manifeste Nationaliste Révolutionnaire" sur le net).

    Donc vu comme ça, le revirement du FN n’est pas tant que ça un revirement, mais disons un relatif retour à une tradition de droite révolutionnaire qu’on peut faire remonter aux années 20 (cf "Ni gauche, ni droite" de Sternhell, le bonhomme est à prendre avec des pincettes mais son bouquin reste la référence) — et même plus loin, si l’on considère que le nationalisme est une dissidence de la gauche remontant à l’affaire Dreyfus (cf "les Droites en France" de René Rémond, "Nationalisme, antisémitisme et fascisme en France" de Winock) — et qui dans ses propres structures (Faire Front) était plus puissante que le FN dans les 70’s.

    Si l’on prends en compte l’existence de cette tradition NR, le reagannisme de l’extrême-droite apparait très lié à la personne de Jean-Marie Le Pen et à une génération (les anciens poujadistes, les anciens d’Algérie, appelés par les NR les "nationaux" ou les "vieux cons") qui ne représentent pas toute l’extrême-droite, ni même tout le FN.
    Là encore, cf Albertini, c’est tout chaud tout récent.

    Bonne journée et encore merci pour cet article !

  • ...
    Et dans une "démocratie" où les promesses n’engagent que ceux qui les croient, causer et promettre, ben... ça mange pas de pain !
    Quand va-t-on s’occuper de l’absence de contrôle sur les mandats ?
    Des mandats qui se succèdent, année après année, portant toujours les mêmes, qui vont par ailleurs faire des leçons de démocratie à qui veut les entendre ?