Entretien avec Maurice Kriegel-Valrimont

par L’équipe de Fakir 04/09/2006

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"J’ai fait le choix, comme c’est le cas des jeunes un peu ardents, de vouloir participer à des grandes choses ! Alors, la vérité c’est que, pour faire ce choix, j’étais en opposition avec mon milieu... J’ai quitté Strasbourg, et je suis monté à Paris au printemps de 1936. J’ai choisi mon moment !"

Enfance

François Ruffin : On prononce « Krié-gel Valrimont », c’est bien ça, ou « Kri-gueul Valrimont » ?

Maurice Kriegel-Valrimont : On prononce « Maurice Krié-gel Valrimont », pour marquer que, en 18, l’Alsace a cessé d’être germanisée. Parce que mes premiers mots de français, c’est en 1918. Quand les troupes françaises entrent à Strasbourg, nous sommes alors des meutes de gosses de quatre à huit ans, et nous nous précipitons vers les Poilus qui arrivent, et ce sont les quatre mots de français que nous prononçons tous ensemble : « Bonjour papa, salut poilu ! ». Tous les gosses qui sont là, on leur a dit que leur père était soldat ! Et ce sont mes premiers mots de français en 1918.

Jeunesse

FR : Je voudrais savoir, avant d’entrer dans la résistance, peut-être même avant la guerre, qui était Maurice Kriegel-Valrimont ?

MKV : Vous avez tout à fait raison de poser cette question, parce que, en ce qui me concerne, je ne suis pas devenu résistant, je n’ai jamais cessé d’être résistant. Et en fait, étant né à Strasbourg en 1914, quand j’étais enfant, quand j’étais gamin, nous allions traverser le Rhin à la nage. C’est-à-dire que l’Allemagne, c’est la porte à côté. Et nous savons ce qui se passe là-bas. Là-bas, il y a des affrontements, déjà, les gens se battent dans les rues ! Avec des armes, dans certaines occasions. Voilà le signe annonciateur de l’arrivée de Hitler au pouvoir. Et même avant l’arrivée de Hitler au pouvoir, en tant qu’étudiant en droit à l’époque, j’étais un jeune antifasciste.

Certains de mes professeurs auraient voulu que je fasse une agrégation en droit. Je suis lauréat de la faculté de droit de Strasbourg. Mais moi, j’étais un étudiant relativement avancé, et je voulais changer le monde. Alors tout ce qui ne comportait pas cela comme choix essentiel, je n’étais pas d’accord.

FR : Vous, vous avez renoncé à faire carrière d’avocat ou de...

MKV : Absolument, et dans toute ma famille, et dans mon entourage universitaire, on me poussait dans ce sens...

FR : Et vous avez fait quel choix, alors, à ce moment là ?

MKV : J’ai fait le choix de vouloir changer le monde à moi tout seul ! (rires)

FR : Pas tout seul, quand même...

MKV : Exactement, vous avez tout à fait raison. Non, non, mais j’ai fait le choix, comme c’est le cas des jeunes un peu ardents, de vouloir participer à des grandes choses ! Alors, la vérité c’est que, pour faire ce choix, j’étais en opposition avec mon milieu... J’ai quitté Strasbourg, et je suis monté à Paris au printemps de 1936. J’ai choisi mon moment ! Et, là, comme je ne voulais pas qu’on m’aide, comme je voulais être indépendant, je choisissais entre acheter de quoi manger et acheter des timbres pour faire des offres d’emplois. Et c’est comme ça que je suis devenu employé d’assurance... C’est là qu’un jour, mon chef de service m’offre une promotion qui consiste à doubler mon salaire. Je me mets à rire, et je lui demande s’il sait qu’on a voté pour que je sois secrétaire général de mon syndicat huit jours avant. Alors il se marre aussi, et la conversation s’arrête évidemment là. Mais ce n’est pas ça qui est important : c’est que, très peu de temps après ça, je suis licencié pour insuffisance professionnelle... (Rires).

La débâcle

MKV : En 40, je suis mobilisé et il y a eu l’exode. C’était terrible ! La situation était terrible. J’ai vu, en Auvergne, j’ai vu des paysans qui vendaient de l’eau pour les bébés... Ca m’a foutu un coup... Je les aurais tués ! C’était... tout à coup... Notre France... C’était misérable !... Vous allez maintenant me demander pourquoi j’interviens, pourquoi je fais quelque chose...

FR : C’est ça : comment devient-on résistant ?

MKV  : Tout ce que je vis à ce moment-là, pour le jeune homme que je suis, un peu exalté, c’est révoltant... D’abord, un pays occupé... Quand on vous dit : vous êtes un pays libre, ça ne veut pas dire grand chose. Mais quand il n’est plus libre, ça veut dire quelque chose, c’est terrible, terrible. Tout est terrible !
Vous descendez les Champs Elysées, et tout à coup vous avez une musique militaire allemande à côté de vous, et vous êtes obligé de vous ranger... Rien que ça : vous voulez les assassiner, vous voulez les tuer, vous voulez les supprimer, et c’est eux qui défilent. Et tout est comme ça ! Vous avez une image de votre pays, vous avez vécu les Lumières, vous avez aimé les exaltations de la Liberté, même ses excès ! A cette époque je n’ai pas encore été communiste du tout, mais je connaissais les hommes : c’étaient des braves types, ils avaient raison ou ils avaient tort, mais c’étaient des hommes entièrement dévoués aux autres, et on les fout en taule. Je ne peux pas accepter ça ! Quand tout est à refuser, il faut dire non ! C’est vrai que vous savez que de vous engager, ça comporte des risques. Mais il y a un moment où ne plus être un homme, c’est pire que de mourir ! La question vient, normalement, on dit : « Mais c’était une petite minorité au début ». Ah, ah, qu’est-ce que ça veut dire ? Quand vous prenez les années 40, 41, les gens plantent des petits drapeaux sur les planisphères ou les mappemondes : les Allemands vont jusqu’au fin fond de la Russie, même les Italiens occupent l’Afrique, les Japonais occupent pratiquement toute l’Asie, etc., les autres avancent partout. Alors, vous allez dire à votre voisin : « Va sur les Champs Elysées détruire la formation allemande ! » ? Ca n’a aucun sens ! Donc, ne dites pas : « Il y en a peu », dites, ce qui est vrai : « Il y en a quand même et tout de suite ! » C’est ça la réalité !

Résistance

FR : Vous avez ce sentiment d’exaspération quand il y a les Allemands sur les Champs-Elysées, vous avez cette colère continuelle contre cette Occupation, mais comment va se traduire votre premier acte de résistance, votre entrée en résistance ?

MKV : C’est un continuum. La vérité, d’une façon ou d’une autre, compte tenu de mes rapports militants avec beaucoup de gens, je baigne dans un milieu. Mais je ne me berce pas d’illusions ! Il ne suffit pas que les gens me disent qu’ils sont contre les Allemands pour que je considère que je suis organisé avec eux !

FR : Finalement, avant la guerre, vous étiez dans un tissu syndical et un tissu politique. Ce que vous dites, c’est que ce tissu syndical et ce tissu politique, pendant la guerre, dès l’Occupation, il était plus ou moins disponible pour, collectivement, former un noyau de résistance ?

MKV : C’est absolument vrai. Ce que vous dites est très important ! Très rapidement, une partie des gens qui avaient déjà une activité, sous une forme ou sous une autre, la poursuivent. Ils se regroupent, ils se rencontrent, ils parlent, ils commencent à faire quelques petits tracts, etc. Mais ça se reconstitue. Ma femme, que vous avez croisée à l’entrée, avant la guerre par exemple, elle était dans des organisations naturistes. C’est là qu’il y avait des hommes comme Fabien. Mais ils étaient, déjà à ce moment-là, ils étaient en rapport par un biais ou par un autre.

(...) Je passais mon temps dans les trains de nuit, parce qu’il n’y avait pas d’autre moyen. Debout ! Et j’allais dans toutes les villes de Zone Sud, pour regrouper des éléments capables de diriger les forces militaires. C’était un peu un aventureux, déjà... Mais on le faisait ! Partout, nous arrivons sans difficulté majeure à constituer des états-majors militaires, avec des gens, ou bien capables, ou bien se formant.

Et ensuite, les Allemands vont nous donner un coup de pouce. Ils sont en grande difficulté, et ils instituent le service du travail obligatoire. Le STO a été le plus formidable moyen de recrutement de la résistance. Jusque là, une partie de la population, quand le gouvernement leur disait : « Ce sont des exaltés, ce sont des cinglés, ce sont des terroristes, ils font leurs coups et puis ensuite, ils font tuer les gens comme otages », une partie des gens était impressionnée. Quand on leur a dit : « Vos gosses, on va les envoyer dans les usines », dont tout le monde savait qu’elles étaient bombardées en Allemagne, et on y envoie vos gosses, vous ne les verrez plus, et on vous les renverra comme cadavres... Que s’est-il passé ? Nous ne sommes pas restés inertes. Nous avons dit aux gens : « Ne donnez pas les gosses ! Nous vous aiderons à les planquer ! » Et nous n’avons pas simplement dit : nous aiderons à les planquer, nous avons organisé le moyen de les soustraire ! Nous avons saboté les centres de recrutement. Nous avons organisé une industrie du faux-papier, par centaines de milliers ! Parce que le moins que l’on puisse dire de ces enfants, le moins !... c’est qu’ils devenaient une armée de réserve... Mais tout de suite ! Et disponible, et capable d’agir ! Ah, c’est énorme. Alors, là, vous avez une illustration qui montre que la division en petits collabos, en petits résistants, et en masses inertes, ça n’a pas de sens... ça ne correspond absolument pas à l’Histoire ! Ce n’est pas comme ça que ça s’est joué.

Conseil National de la Résistance

FR : Simplement, là, il y a quelque chose que je voudrais comprendre. C’est qu’on est dans une lutte de libération nationale, et à un moment, il y a un programme qui surgit, le programme du Conseil National de la Résistance, et qui là n’est plus seulement un programme pour dire « nous allons bouter les Allemands hors de France », mais aussi « on va instaurer un certain nombre de mesures politiques, de mesures sociales, quand le territoire sera libéré ». Alors, comment se fait-il qu’on passe d’une lutte de libération nationale, avec toutes les tendances politiques, à la limite, pourrait-on dire à ce moment-là, à une lutte qui va avoir un contenu politique et un contenu social assez importants ?

MKV : Le seul point sur lequel je fais une toute petite réserve, c’est de dire « on passe »... La vérité, c’est une évolution normale. Les forces institutionnelles manquent à leur mission, elles cessent d’être les forces dirigeantes. Elles ne dirigent plus rien. C’est ça la donnée réelle.

Je n’ai pas besoin de vous faire un dessin pour l’armée. Mais tout le reste est à l’avenant. Cette très respectable magistrature qui, à l’époque, avait une image quasi religieuse... Est-ce que vous savez combien de magistrats ont refusé de prêter serment à Pétain ?... Un ! Un seul ! Dans toute la France. Eh bien... Qu’est-ce que vous voulez que je vous dise ? La haute administration... Les églises... Les forces économiques, c’est épouvantable : l’organisation des comités économiques, c’est directement au service des Allemands ! C’est pour ça que je vous dis : « On ne passe pas », on n’a rien à passer, ils ne sont pas là ! (Rires.)

En même temps, il y a déjà, et il ne faut pas le voiler : la résistance, dans son ensemble, ce n’est pas un idylle dans un pré vert, avec des pommes rouges et des lunes brillantes. Ce sont des tendances différentes. C’est la France, c’est la France dans sa différence, et cette différence, il ne faut pas la camoufler ! Je ne veux prendre qu’un exemple : au comité d’action militaire, le militant syndical que je suis rencontre un homme des deux cents familles. C’est Jean de Vogüe, c’est un homme des deux cents familles, c’est l’industrie sucrière ! Il est propriétaire du château de Vaux-le-Vicomte. Il est officier supérieur de la Royale. Dans le jargon de l’époque, c’est un ennemi de classe. Mais de quoi lui et moi nous nous apercevons ? C’est que, dans la mesure où nous voulons la libération du territoire, nous nous rejoignons.

FR : Mais justement, ce qui est surprenant, là, dans ce programme du Conseil National de la Résistance, c’est qu’on ne se limite pas à la libération du territoire, mais il va y avoir une volonté d’avancées sociales, et là, on se dit : si vraiment il y avait des gens des deux cents familles, à...

MKV : Mais ils y sont !

FR : ...à l’intérieur de la résistance, comment se fait-il qu’on ait un programme fort à gauche ?

MKV : Mais ça signifie une chose toute simple : un certain nombre d’hommes, y compris d’origines sociales diverses, prennent conscience de ce qui est majeur du point de vue de l’intérêt national. Patriote, ça veut dire quelque chose. Et je ne revendique pas d’être moi tout seul un patriote. Je ne conteste pas qu’à ce moment-là, de Vogüe est un patriote. Eh oui ! Mais ça c’est l’Histoire. Quand l’Histoire grandit, les hommes grandissent avec ! (Rires)... Et c’est beau à voir, c’est beau à voir ! D’ailleurs, vous savez bien, à quelle vitesse, ensuite, on revient en arrière : à toute allure, et en y mettant la cravache !

Libération

FR  : Aujourd’hui, quand on va revenir sur des acquis sociaux, on ne dit pas qu’on va détruire des acquis sociaux, on dit qu’on va faire une réforme, que la réforme va être là pour sauver le système, et que le système est en péril, parce qu’il y a soit des déficits publics, il y a des déficits commerciaux, il y a un trou dans la caisse de la Sécu, et tout ça est chiffré à chaque fois par les ministères, en millions ou en milliards d’euros. Vous, à la Libération, vous avez contribué à mettre un système de retraites en place, il y a aussi eu la sécurité sociale, alors moi, ce qui me paraît assez surprenant, c’est que tout ça se fait dans un contexte où les déficits publics, ce n’est même plus la peine d’en parler ! J’avais relevé un petit extrait de la situation de la France au moment où vous prenez ces mesures. On nous dit : « En 1944, la France est à genoux, 74 départements ont servi de champs de bataille, la production industrielle ne représente que 29% du niveau de 1929. Les recettes fiscales couvrent à peine 30% des dépenses publiques, la dette nationale a quadruplé. Une foison de billets pourchasse une pénurie de produits. » Et donc, c’est dans ce contexte là, vous, vous êtes complètement inconscient, vous voulez encore plus mettre la France à genoux !, c’est dans ce contexte là que vous décidez qu’il faut mettre en place une sécurité sociale et des retraites... Mais on a dû penser que...

MKV : Mais c’est exactement ce qui s’est passé. Il ne faut pas croire qu’à l’époque, il n’y ait pas de gens qui nous ont dit ce que vous venez de dire ! Ils nous ont dit « Vous êtes fous ». C’est bien pire que ça : la France n’avait plus de ponts, le France n’avait plus de charbon, la France n’avait plus d’acier, la France n’avait plus d’énergie. Bien. C’est vrai que c’était à peine concevable. Bien. Nous sommes passés outre, tout bonnement. Nous sommes passés outre et nous avons fait les choses. Alors là, la preuve a été faite, l’investissement social est un investissement économique formidable ! Et c’est vrai, je n’ai aucune hésitation à le dire, les Trente glorieuses n’auraient pas été possibles si nous n’avions pas fait cette législation sociale. Historiquement, la chose est démontrée. On pouvait discuter avant, mais historiquement, on ne peut plus en discuter. C’est grâce à la législation sociale que les progrès ont été accomplis. Ca veut dire une chose d’une simplicité puérile : les gens qui vivent sur le dos des autres, les gens qui bénéficient du travail des autres, les gens qui exploitent les autres, ils n’ont pas de scrupules ! Ils sont capables de charité, mais le fond de leur attitude est de croire que, pour vivre, pour que l’humanité fonctionne, il faut qu’il y en ait qui profitent et d’autres qui subissent.

FR : Et donc, vous, vous dites, aujourd’hui, où on vient de nous dire : le poids de la dette publique française, selon les nouvelles normes internationales, a doublé, vous, vous dites : ce n’est pas une raison pour ne pas conquérir de nouveaux droits sociaux ?

MKV  : Je dis plus que ça. Je dis que, dans toute une série de domaines, le fait de donner, de garantir ces droits sociaux résout le problème posé. Je dis que, si on passe de, en fait sept millions de gens qui sont hors du circuit du travail, ce qui est le cas, si on passe simplement à deux millions de gens, le problème est résolu.

Espérance

FR : J’ai trente ans, c’est à peu près l’âge que vous aviez à la Libération.

MKV : Exactement.

FR : Le climat, qui est le climat d’aujourd’hui, c’est un climat de... de résignation...

MKV : Je vais prendre deux moments. En 1934, la France a l’air dans une situation pré-fasciste. Et les fascistes se manifestent, et ils essaient de prendre le pouvoir. Il y a des forces, dans l’armée, qui sont candidats, il y a la Cagoule, etc. C’est sérieux ! Et dans l’ensemble, l’état d’esprit n’est pas meilleur qu’aujourd’hui. Ca, c’est 1934. En février 34, c’est la première grande manifestation où se rassemblent les forces syndicales et où ils vont dans l’autre sens. En 36, c’est le Front populaire. En deux ans, non seulement vous avez un recul du fascisme, mais d’une certaine manière en France le fascisme est battu... En deux ans... Si en 34 quelqu’un vous avait dit que deux ans après, en France, ce serait le Front populaire, on vous aurait ri au nez. J’imagine, là, j’ai vu quelques uns de mes gars de l’époque, de mes militants syndicaux, je les ai vus rire. Ils n’auraient pas cru. Ils n’auraient pas cru... Mais ça ce n’est rien du tout. En 42... Stalingrad est à portée de la conquête des Allemands. C’est-à-dire : c’est fini ! Le monde est sous la botte fasciste... Et en 44, Paris est libéré... (Rires.) Là, j’ai imaginé... vous savez, nous avons été dans la même cellule avec Aubrac, avec Ravanel, à Lyon, et si l’un de nous, un soir, une nuit, s’était réveillé, on n’avait que des matelas. On était trop nombreux pour pouvoir coucher sur le dos, il fallait être couché sur le côté. S’il y en avait un qui changeait de position, il fallait que tout le monde change de position. Bien. Si l’un de nous avait dit que dans deux ans Paris serait libéré, les autres auraient passé le reste de la nuit à rigoler ! C’était invraisemblable... et c’est deux ans (rires). C’est ça ma réponse....

FR : Mais, c’est comme si il y avait aujourd’hui un sentiment d’auto-paralysie de chacun, qu’on s’auto-convainquait que ce n’est pas possible. Alors que finalement, il n’y a pas les Allemands en face...

MKV : Je suis pleinement d’accord avec vous. D’abord, si vous prenez même les deux, trois dernières années... Vous avez connu il y a quelques années comme ça une espèce de morosité insupportable. On s’emmerdait, excusez-moi. Mais c’est vrai ! Les choses sont devenues plus intéressantes. Il se passe tout le temps quelque chose qui mérite examen, qui mérite qu’on en discute, qui mérite qu’on en parle. On ne s’ennuie plus autant. Et c’est le signe qu’il y a des tas de gens qui posent les bonnes questions. Ce qui manque encore, c’est les bonnes réponses. Alors, euh, moi j’ai du mal à le dire, mais il faut attendre un peu, mais pas trop, parce que c’est un peu tard, pour moi. (Rires.)

FR : Vous voulez dire que vous êtes pressé d’assister à ce printemps-là ?

MKV : Euh, quand j’étais jeune député, le père Cachin, il avait 80 ans. C’est-à-dire que maintenant ce serait un jeune homme pour moi. Mais à l’époque, c’était un très vieux monsieur. Alors nous étions quelques jeunes intellectuels, comme ça, et ça lui plaisait de retrouver sa propre jeunesse...

FR : Marcel Cachin, c’est ça...

MKV : Marcel Cachin, le dirigeant communiste. Et alors, de temps en temps, il nous prenait pas le bras, comme ça, il disait : « Faut y aller, faut vous dépêcher, moi je veux le voir, le socialisme. » (Rires.) Et nous, on trouvait que c’était bien.


(exclusivité édition électronique)

Notes)
 [1]

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Il existe aussi un reportage de "Là-bas si j’y suis" avec Maurice Kriegel-Valrimont (8 mai 2006), dirigeant national de la Résistance, membre du Comité d’Action militaire du Conseil national de la Résistance.

> Ecouter l’émission

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[1(1) photo : Maurice Kriegel-Valrimont (date inconnue)

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